Comment j'ai trouvé ma voie

J’ai “trouvé” ma voie et mon Maître, Sri Chinmoy, en 1979. J’avais alors 24 ans et je travaillais alors comme assistante à Europe Assistance depuis presque 2 ans, je crois. J’avais fini mes études à l’ISIT (Institut d’interprétariat et traduction) et en droit, et me demandais bien ce que j’allais faire de ma vie. Au cours de mon adolescence, j’ai toujours été quelqu’un qui “cogitait” beaucoup, se posait beaucoup de questions et surtout beaucoup de réflexions sur les comportements autour de moi, sur la vie, ce qui se passait autour de cette planète, etc... On a donc pensé que ma vocation serait la psycho  et je me faisais à l’idée...jusqu’au jour où je suis allée m’inscrire en fac de psycho. Je faisais une queue interminable devant les guichets d’inscriptions, et entendais les conversations autour de moi. Je ne sais ce qui m’a pris, mais j’ai tout d’un coup réalisé que j’allais apprendre à étiqueter les gens et surtout les écouter et les appréhender selon des écoles, des schémas, des systèmes, bref, selon tout sauf ce qui pour moi était l’essentiel : la perception que j’appelais alors “intérieure”, disons spontanée, non mentale, de l’autre. Je suis partie en courant... Je me suis inscrite à l’ISIT et en droit sans aucune conviction, mais en me disant que çà me servirait toujours. Et puis parallèlement, je continuais à chercher ce pour quoi j’étais vraiment venue sur cette terre. J’ai lu beaucoup ; de fil en aiguille, j’ai rencontré Saint-Exupéry, Khalil Gibran, René Guénon, les dialogues avec l’ange, et puis Rabindranath Tagore, ce poète indien merveilleux qui m’a vraiment fascinée. Et puis aussi les pratiques spirituelles des Incas, des Egyptiens et tout ce qui traitait de la communication en silence. J’en avais assez des méprises, des discours à n’en plus finir qui n’aboutissaient à rien qu’à faire ronronner son ego et à le faire valoir auprès de gens qui de toutes façons, n’écoutaient pas parce qu’ils n’en avaient rien à faire, et parce qu’ils avaient leur propre ego à faire ronronner et à écouter. Je ne trouvais pas non plus de personnes avec qui partager ma soif de plus de profondeur, mon ras-le-bol de tant de superficialité autour de moi. Mon aspiration à quelque chose que je n’arrivais pas à cerner rendait ma vie insupportable parce que je vivais dans la frustration et le sentiment que je ne trouverai jamais à combler l’insatisfaction dans laquelle je vivais.

Un rayon d’espoir naquit lorsque j’ai fait du yoga avec un ami qui m’apprit à respirer et à méditer. J’avais 20 ans. Quelques expériences au niveau de mon être intérieur m’ont bouleversée et ont commencé à répondre à  mes questions : l’une de ces expériences me vint alors que j’étais plongée dans l’écoute de la nature, assise au milieu d’une prairie. Je contemplais une toute petite pâquerette et les paroles de St Exupéry au Petit Prince me vinrent à l’esprit : “tu es responsable de ta fleur”. J’ai senti mon cœur étouffer dans ma poitrine, comme s’il était enfermé dans une cage, et j’ai longuement pleuré puis prié pour que cette cage se brise et laisse l’oiseau de mon âme s’envoler pour enfin devenir ce que je devais devenir. J’ai beaucoup “médité” ou pratiqué ma propre forme de méditation pendant 2 ans, en méditant sur la respiration et sur une flamme de bougie. Et puis lorsque j’ai eu fini mes études et que je suis entrée dans la vie active, j’ai un peu lâché tout cela pour “faire la fête”. Cà n’a pas duré très longtemps, au bout de 2 ans, je me suis retrouvée à nouveau complètement désemparée, vide, déprimée par le gâchis que je faisais de ma vie. J’avais l’impression d’avoir perdu mon temps.

Retour au silence : je suis partie une semaine à l’abbaye du Mont St Michel, chez les bénédictins où j’ai vraiment pu me recentrer dans le silence, le chant grégorien, le service (cuisine et plonge), et la contemplation de la mer. Instants vraiment magiques et d’une richesse inouïe. Une des moniales, me rencontrant dans le jardin me dit quelque chose qui me frappa :  “vous êtes sûrement faite pour Dieu, mais pas dans une clôture !" (pas dans un monastère ou un lieu fermé)”. Une chose pour moi était dorénavant claire : la vie intérieure, mais pas la religion. Mais je n’avais vraiment aucune idée de la manière dont je pouvais concrétiser cela au quotidien. Je décide en tout cas dès mon retour à Paris de me mettre au chant et de faire plus de sport, de m’occuper un peu de ce corps qui me demandait vraiment de vivre plus sainement, d’arrêter de fumer, de courir, prendre l’air, m’aérer le plus possible et devenir plus forte, plus dynamique. Et puis un jour, je tombe sur une annonce d’un concert donné par une chorale complètement inconnue, mais qui chante des chants qui rappellent la poésie de Rabindranath Tagore. Je fonce à l’église des Blancs Manteaux, et là, ce fut le choc de ma vie. J’ai écouté ces chants à 4 voix dans une sorte de béatitude inexplicable. Je suis sortie de l’église complètement surexcitée, avec une envie d’embrasser tout le monde, de crier de joie. Je ne cessais de me dire : j’ai trouvé, çà y est, j’ai trouvé ! Peu m’importait de ne pas savoir du tout ce que j’avais trouvé. La certitude était là, la joie si immense, telle que je n’en avais jamais éprouvée, palpitait dans chacune de mes veines. Quelques mois plus tard, je me décidai enfin à appeler le n° de tel du directeur du chœur pour lui demander si je pouvais faire partie de leur chorale. Il m’invite à une conférence sur la méditation. En sortant de la conférence, j’ai jeté mon dernier paquet de cigarette, et j’ai commencé ma nouvelle vie avec celui que j'avais déjà reconnu comme mon Maître : Sri Chinmoy.